Les délais d’attente des candidats : une problématique forte et récurrente
L’examen du permis de conduire est le « premier examen de France » tant dans les chiffres – 3 300 000 examens par an dont 1 325 000 examens B - que dans les faits, en tant qu’élément clé de la vie sociale et économique. Avec un taux de réussite de 60% en première présentation de l’épreuve pratique B, la France se situe dans la moyenne européenne.
Se présenter au permis de conduire dans un délai raisonnable est une préoccupation forte des candidats qui sont largement ignorants du système d’attribution des places d’examens. De fait, l’obtention d’une place d’examen relève souvent du parcours du combattant. Les délais d’attente et le coût de la formation complémentaire concernent 40% des candidats pour lesquels la méthode nationale d’attribution des places s’avère contraignante, notamment en n’apportant pas de droit à places d’examen à l’école de conduite pour la deuxième présentation. Penser la problématique des délais de présentation aux épreuves du permis de conduite, c’est mettre à jour un blocage qui ne date pas d’hier. La question se pose depuis bientôt quarante ans et les chiffres n’ont cessé d’augmenter. Dans les années 2000, plusieurs facteurs ont participé à enrayer le système, que ce soit la suspension du service national (pendant lequel un nombre non négligeable de jeunes passaient le permis) ou l’allongement de la durée de l’examen à 35 minutes. Si le nombre d’inspecteurs a été augmenté pour faire face aux besoins, force est de constater que les délais d’attente en 2013, entre deux présentations, sont en moyenne de 98 jours. Ces délais sont mal vécus par l’ensemble des parties prenantes à l’éducation routière et au permis de conduire : ils sont un gouffre financier pour les candidats, une zone d’errance et d’incompréhension qui dure de trois à six mois et à laquelle les institutions n’apportent pas de réponses satisfaisantes, ce qui est un facteur de tensions supplémentaires entre les écoles de conduite, l’administration et les candidats. On sait pourtant que pour nombre de personnes cet examen représente l’un des seuls examens officiels qu’ils passeront dans leur vie et qu’il est un véritable passeport vers l’autonomie, un levier essentiel d’insertion professionnelle et sociale.
Partant d’une constante jamais démentie qui montre que lorsque le nombre de places d’examen augmente, le taux de réussite diminue (ce qui accroît le coût de la formation), il a semblé urgent de faire un diagnostic approfondi de la situation concernant les délais d’attente, de réfléchir à un équilibre entre offre et demande de places d’examen et plus largement de revoir le fonctionnement des attributions de ces places.
Les membres du groupe de travail : plus qu’une étude en groupe pour produire un rapport, le pari d’une co-construction de solutions
Les pouvoirs publics se sont plusieurs fois emparés du sujet sans parvenir à ce jour à faire évoluer les lignes significativement. Face à cette situation, Monsieur Manuel Valls, ministre de l’intérieur, a conclu en septembre 2013 à la nécessité de mettre en place un groupe de travail spécifique, sous la coordination de Madame Florence Gilbert, Directrice Générale de Voiture & co et Présidente de la Commission « Jeunes et éducation routière » du Conseil national de la sécurité routière.
Pourquoi avoir élargi le sujet ? De la question des délais d’attente à celle de la refonte du permis de conduire.
La mission du groupe de travail était de produire un diagnostic partagé et de déterminer des leviers d’action dans l’objectif de réduire les délais d’attente pour se présenter aux épreuves et améliorer le taux de réussite du permis.
Pour porter un regard nouveau sur cette question complexe qui était posée, le groupe a souhaité une approche à l’image de la volonté commune des membres de coopérer. De par un format original et grâce à la volonté partagée de ses membres de co-construire une analyse et des recommandations pertinentes, le groupe a pu animer des débats riches et faire émerger une approche globale de la problématique.
En tant qu’acteurs de la sécurité routière et de l’éducation routière, il a été possible d’aller au-delà des différences structurelles et de faire converger les forces pour répondre d’une
seule voix aux problématiques des candidats. En tirant le fil des délais d’attente, c’est la question des interactions entre les parties prenantes à l’éducation routière qui est apparue, mais aussi celle de la formation au permis, du coût de cette formation, de la forme de l’examen, des inégalités entre écoles de conduite, de la complexité des circuits administratifs, de la difficulté à faire évoluer les lignes institutionnelles. L’interdépendance des problématiques est une évidence : y répondre implique de penser hors du cadre initialement proposé lors de la mise en place du groupe de travail. Par cet élargissement du champ de réflexion, le pari a été fait de conduire une analyse en profondeur des rouages qui sous-tendent l’apprentissage à la conduite afin de répondre avec justesse et réalisme à la problématique des délais d’attente.
Le constat originel est simple : la question des délais de présentation est au coeur d’une dynamique plus large de révision et de modernisation du permis de conduire. Il n’est pas envisageable de réduire les délais d’attente sans repenser à la base le fonctionnement du permis. Le sujet est ancien. Derrière ces blocages, c’est un véritable enjeu de société qui est pointé du doigt par la population, que ce soit aux plans de la sécurité routière, de l’insertion économique et sociale ou encore de la mobilité. Vouloir réduire les délais d’attente, c’est devoir accepter l’idée d’un changement total de paradigme sur le permis de conduire. Il n’est pas possible de faire l’économie d’une profonde remise en question des mécanismes qui permettent aujourd’hui l’apprentissage de la conduite et la présentation à l’examen du permis.
Enjeux et objectifs : co-construire un dispositif global : considérer le permis comme un tout, une quête de cohérence.
Si la lutte contre l’insécurité routière a permis une diminution importante des chiffres de la mortalité routière, les jeunes restent pourtant de loin les premières victimes avec un pourcentage de tués et d’accidentés par rapport à la population qui ne diminue pas. Jusqu’à aujourd’hui la formation au permis de conduire n’était pas assez mise en avant pour pouvoir être un levier efficace dans cette lutte en faveur d’une plus grande sécurité routière. Pour atteindre l’ambition affichée de 2 000 morts en 2020, les acteurs de la formation doivent être au coeur du plan d’action à venir. Des pays européens ont fait le pari de formations allongées, avec à la clef des baisse d’accidentalité de 15 à 30%.
C’est dans cette perspective que le groupe s’est mis au service de la recherche d’une proposition de dispositif global en vue de transformer le permis de conduire dans son ensemble et de le rendre en phase avec ce que représente la conduite aujourd’hui : un symbole de mobilité citoyenne, de liberté et d’autonomie pour les individus, mais aussi un levier de développement économique et sociale, un moyen de transport incontournable et un vecteur de prise de conscience écologique et solidaire.
C’est grâce à cette dynamique que la question des délais d’attente a pu être abordée sous un angle global et dans une logique systémique, en considérant l’ensemble des parties prenantes au permis de conduire. Ce projet s’inspire des différentes observations qui montrent que le système fait souffrir l’ensemble des acteurs de la conduite depuis de longues années.
Une situation de crise
Actuellement, les usagers ne sont pas satisfaits par les conditions de formation à la conduite et de passage du permis de conduire. Les surcoûts importants pour les candidats, dus à des heures de formation supplémentaires, sont une source de tensions. Ces freins ne sont compatibles ni avec une politique de transparence sur le coût du permis ni avec la revalorisation de l’examen du permis lui-même.
Si le système ne convient pas aux candidats, il ne convient pas non plus aux inspecteurs et aux professionnels de la conduite, face au sentiment de dévalorisation de leur rôle auprès des usagers. Non seulement un climat de tension règne entre écoles de conduite et candidats mais les IPCSR subissent des agressions dans les missions de passage d’examen… Le manque de dialogue peut parfois entraîner un clivage entre les deux professions qui peinent à coopérer.
Une méthode d’attribution aux effets pervers
La méthode de répartition des places d’examen attribuées aux établissements d’enseignement de la conduite automobile (EECA), dite « de la première demande », qui datait de 1984, a été remplacée en 2006 par une nouvelle méthode d’attribution, la NMA, après concertation avec les organisations professionnelles et expérimentation dans 13 départements pendant plusieurs années. La circulaire n° 2006-3 du 13 janvier 2006 étend le dispositif à l’ensemble du territoire et prévoit la création d’instances spécifiques, afin d’en effectuer un suivi et de faire évoluer le système en tant que de besoin : une Commission Nationale de Suivi gérée en administration centrale (DSCR-ER) et des Comités Locaux de Suivi (CLS) dans les départements, au sein desquelles siègent les organisations professionnelles représentant les EECA et les organisations syndicales représentant les IPCSR.
La NMA fonctionne avec une population de référence établie afin de déterminer le nombre de places attribué à chaque EECA. Pour l’épreuve théorique générale (ETG), est retenu le nombre total de candidats reçus, chaque mois, à cette épreuve. Pour les épreuves pratiques, est pris en compte le nombre de candidats examinés en première présentation, chaque mois par catégorie (pour l’épreuve hors-circulation pour la moto et le groupe lourd). Le calcul s’effectue selon une moyenne annuelle appelée « période de référence ».
Cette dernière s’étend de M-1 à M-12 pour le mois M afin de fixer le coefficient à M+2. Autrement dit, le mode de calcul repose, pour l’attribution des places d’examens pratiques, sur les candidats présentés en premier examen pratique pendant 12 mois de référence. Les écoles de conduite sont ainsi incitées par cette méthode à présenter de façon prioritaire les candidats qui passent pour la première fois (ceci afin de ne pas se pénaliser dans leurs futures attributions de places), les candidats ayant subi un ou plusieurs échecs vont attendre plusieurs mois avant de pouvoir être représentés à un examen qui souvent leur est nécessaire pour travailler ou trouver du travail. Ce système ne répond ni aux besoins des candidats ni à ceux des écoles de conduite : il freine considérablement le développement des écoles de conduite et pénalise les établissements qui s’installent par un faible nombre de places accordées.
Cette méthode se veut vertueuse en encourageant les écoles de conduite à ne présenter que des candidats suffisamment préparés, en tout état de cause, susceptibles de réussir dès la première présentation. C’est donc bien aux écoles de conduite qu’il appartient de choisir les candidats à présenter. Néanmoins, cette méthode est difficile pour les établissements créant leur activité et n’atteint pas complètement son objectif pour ceux qui sont capables de présenter des premières présentations en nombre important en raison d’un emplacement géographique privilégié par exemple (proximité d’un lycée).
Comparaisons européennes
La France est le seul pays européen où le passage des examens du code et de la pratique n’est pas payant. Le coût de la formation aux examens est en revanche dans la moyenne des autres pays. Enfin, la France est aussi le pays qui connaît le délai d’attente le plus long : dans les pays européens, les délais sont en moyenne d’1 mois ½.
Taux d’accidentalité trop important chez les jeunes
Les derniers chiffres de 2013 font état de 3 250 tués sur les routes dont 50% d’automobilistes et 20% d’usagers de 2 roues motorisées. Sachant que les 18-24 ans représentent 21% de la mortalité routière mais seulement 9% de la population et que les conducteurs ayant un permis de moins de 2 ans sont impliqués dans un quart des accidents, il est urgent et nécessaire d’inscrire la formation à la conduite au coeur des priorités des stratégies politiques de sécurité routière.
Un permis probatoire non abouti
Actuellement, une phase probatoire de 2 ans précède l’attribution du nombre total de points. Durant cette période, le conducteur novice ne bénéficie d’aucune formation ou information particulière. Or, cette durée devrait permettre d’assurer une plus grande maîtrise de la mobilité pour les jeunes conducteurs, donc une plus grande maîtrise de la sécurité routière. Ce n’est pas le cas aujourd’hui.
L’accès au permis de conduire des jeunes en insertion et en difficultés financières
Malgré de nombreux et coûteux investissements nationaux et locaux, l’impact sur le nombre de permis obtenus par les jeunes en insertion et/ou en difficultés reste très faible.
L’obtention du permis, souvent préconisée, n’est pas toujours la solution adéquate et prioritaire. D’autres solutions de mobilité pérennes pourraient être envisagées avant de proposer aux jeunes de se lancer dans le passage du permis de conduire.
Il est trop souvent constaté une absence de motivation pérenne des candidats, qui ne sont pas toujours prêts à entamer cette démarche d’apprentissage et à être assidus pour suivre la formation. Cette absence de motivation et de réussite chez les publics les plus fragiles s’explique en partie par l’absence de propositions d’accompagnements complémentaires, type module de cours d’alphabétisation, qui instaureraient un cycle vertueux de formation et d’insertion sociale et professionnelle. Pour l’instant, les difficultés ne sont pas pensées de manière globale en vue de lever le frein à l’emploi et à la mobilité. Les obstacles à la formation du candidat, du fait d’aides qui ne prennent pas l’intégralité du dispositif en charge (notamment les heures complémentaires après échec lors de la première présentation) ou plus simplement d’aides qui ne bénéficient pas toujours aux plus démunis (lors des demande de garanties par exemple) achèvent de démotiver les candidats au permis de conduire.
Des effectifs IPCSR insuffisants
Le projet de loi de finances 2014 prévoyait la suppression de 35 postes de personnels
techniques.
Une telle mesure qui représente la suppression d’un potentiel d’environ 85 000 examens par an apparaît incompatible avec la mission de réduire les délais d’attente des candidats au permis de conduire, d’autant plus que l’année 2013 s’est déjà traduite par une dégradation de la situation (98 jours d’attente entre deux présentations contre 86 jours en 2012). Aussi, fin 2013, il a finalement été annoncé par le ministère le recrutement de 25 IPCSR sur 2014.
Le nombre d’IPCSR reste insuffisant pour couvrir le besoin en places d’examen. Plus précisément, si la situation devrait à terme s’améliorer compte tenu de la diminution du nombre d’inscrits et l’augmentation du taux de réussite, le besoin estimé d’IPCSR se fait sentir de manière inégale sur le territoire. Certains départements n’expriment pas de difficultés en termes d’effectifs et de délais d’attente, pendant que d’autres affrontent des problématiques récurrentes d’attribution de places. Les inégalités sont profondes et peinent à être compensées par le dispositif de réserve nationale que gère la DSCR.
Des inégalités territoriales
Certains départements n’expriment pas de difficultés en termes d’effectif et de délais d’attente, pendant que d’autres affrontent des problématiques récurrentes d’attribution de places. Les inégalités sont profondes sur l’ensemble du territoire. Il existe un nombre de postes d’inspecteurs par départements et en cas de besoins, l’Etat gère la réserve nationale d’inspecteurs. Cette gestion nationale complexe ne répond pas aux besoins locaux.
HISTORIQUE ET PROPOSITIONS RECENTES
Le groupe de travail s’est appuyé, outre les contributions de ses membres, sur des études et des rapports produits ces dix dernières années afin de capitaliser sur les efforts réalisés et sur les recommandations faites. La volonté n’est pas d’apporter une énième contribution à un dispositif ne remplissant qu’imparfaitement sa mission, mais bien d’offrir, par un regard neuf, une clé supplémentaire qui pourrait participer à un choc de modernisation sans doute nécessaire.
Faciliter l’accès des jeunes au permis de conduire
Rapport Parlementaire de M. Jean-Michel BERTRAND, 2005
En 2005, le rapport parlementaire de M. Jean-Michel Bertrand propose un état des lieux et des axes stratégiques pour faciliter l’accès des jeunes au permis de conduire et plus globalement pour repenser le permis de conduire. Il formule des propositions qui permettent d’inspirer les décisions du gouvernement en place.
Partant du constat que le permis de conduire est souvent difficile à financer pour les jeunes, il propose de faciliter les méthodes de financement, de responsabiliser les jeunes dans leur démarches et de les accompagner tout en rejetant toute forme d’assistanat.
Etaient envisagées à cet effet, la création d’un Livret d’Epargne « Formation au permis de conduire » ainsi que la diffusion par l’Etat d’un chèque « Formation au permis » pour ceux qui n’auraient pas ouvert de livret.
Constatant la fragilité des jeunes conducteurs et les sur-risques statistiques, il propose d’améliorer l’apprentissage de la conduite en agissant sur la formation initiale. Généraliser l’apprentissage anticipé de la conduite (AAC), faire du permis un outil au service de l’insertion sociale et professionnelle, mieux évaluer les besoins de formation en vue de maîtriser les coûts, accélérer les procédures, améliorer les enseignements de la conduite et promouvoir la formation continue des conducteurs : autant de pistes pertinentes que le rapport s’attache à développer.
L’étude constate que les conditions de passage d’examens posent des problèmes sérieux.
Sur le plan théorique, il dénonce l’intellectualisation de l’épreuve théorique générale (ETG) qui pénalise à terme un grand nombre de candidats et pointe du doigt le caractère inadapté de l’outil de contrôle des connaissances. Sur le plan pratique, il démontre la nécessité d’apaiser les tensions liées à l’examen : attente d’une date, accueil et présentation et résultat. Ces trois sont en lien les unes avec les autres et sont considérées comme faisant partie non seulement d’un tout qu’est l’examen pratique mais plus généralement d’un tout que représente le passage du permis.
En proposant que l’accès à la conduite et à la mobilité soit un élément à part entière du volet « mobilité et insertion sociale et professionnelle » de la loi de 2005, le rapport ouvre la porte à une approche moins formelle et à une refonte globale du permis de conduire. C’est dans cette lignée que ce groupe de travail a travaillé.
Rapport sur la rénovation des relations entre l’administration et les écoles de conduite et de sécurité routière. Pour améliorer la qualité et l’efficacité de l’enseignement de la conduite et de la sécurité routière
Rapport de MM. Claude LIEBERMANN et Henri LEGENDRE Juillet 2005
Ce rapport rédigé après une année de concertation souligne également le besoin de promouvoir l’AAC, de simplifier les relations avec les écoles de conduite s’agissant de l’attribution des places d’examens, préconise une mise en oeuvre progressive de la nouvelle méthode d’attribution des places, recommande de réfléchir à une meilleure localisation des centres d’examen département par département, et encourage l’administration à rendre plus homogènes les procédures d’évaluation. Le rapport insiste aussi sur la nécessaire concertation aux plans local et national avec les représentants des écoles de conduite.
Audit sur la modernisation de l’apprentissage de la conduite et de l’examen du permis de conduire
Rapport de MM. Dominique LEBRUN, Michel MATHIEU et Firmino FRACCARO, Mai 2008
En abordant de front la question de la refonte du permis de conduire, l’audit sur la modernisation de l’apprentissage de la conduite et de l’examen du permis de M. Dominique LEBRUN en mai 2008 vise deux objectifs : améliorer l’efficacité du processus « formation/validation » tout en maîtrisant les coûts et les délais. Ce rapport, commandé par les ministres chargés de l’écologie et de l’intérieur, est le dernier en date. Il fait un état des lieux des caractéristiques de la formation à la conduite, de l’apprentissage dans le cursus scolaire à l’apprentissage dans les écoles de conduite. Il fait une description détaillée de l’examen du permis de conduire et du parcours du candidat puis il énonce les principales critiques faites au système. On retrouve ici les constats qui ont guidé les travaux du groupe tout au long des six derniers mois : inadaptation des formations face aux enjeux de sécurité routière, coûts de la formation, difficultés inhérentes au passage de l’examen théorique et pratique, conditions matérielles insuffisantes et harmonisation encore insuffisante des examens, écoles de conduite de qualité très inégale sur le territoire, complexité des fonctionnements administratifs, isolement des inspecteurs, manque de confiance dans les rapports entre élèves et écoles, relations complexes entre les inspecteurs et les écoles.
Le rapport LEBRUN propose de relever le niveau de la formation et de modifier les critères d’évaluation de l’examen en faveur d’une plus grande harmonisation et d’une amélioration des conditions de passage de l’examen. Il insiste sur la nécessité d’une plus grande maîtrise des coûts et des délais et propose un nouveau dispositif de pilotage de l’ensemble du système via la création d’une agence de service public qui coordonnerait l’organisation de l’examen du permis. En cas d’échec ou d’insuffisance, il propose de créer une délégation de service public. En conclusion, c’est l’accent sur une plus grande efficience des processus qui est préconisée, toujours au service de la progression de la sécurité routière et de la réduction du nombre de victimes sur les routes.
Accélérer, simplifier et réduire le coût du passage de l’examen du permis de conduire
Proposition de loi du député M. Jean-Christophe FROMANTIN, Décembre 2013.
Monsieur Jean-Christophe Fromantin, député des Hauts-de-Seine, a déposé en décembre 2013 une proposition de loi visant à réformer le permis de conduire. Soutenu par 80 députés, il insiste sur l’urgence pour les pouvoirs publics de mettre enfin en place des moyens appropriés pour passer le permis. Etirement du temps entre l’inscription et le passage d’examen, élévation du prix global du passage du permis, augmentation du nombre de conducteurs sans permis : les constats sont les mêmes que dix ans plus tôt mais les chiffres et les tensions augmentent.
La solution qu’il propose préconise plus de « privatisation » : elle consiste à confier l’examen du permis de conduire à des organismes privés certifiés, qui serait réalisé dans les mêmes conditions et sur les mêmes bases que l’examen actuel. Si pendant deux ans le titulaire commet une infraction, il devra passer à nouveau l’examen auprès d’un inspecteur du permis de conduire et de la sécurité routière (IPCSR). Ces derniers seront aussi en charge du contrôle plus généralement de la qualité des examens. Cette proposition vise à désengorger le système, à fluidifier les examens grâce à l’intervention d’organismes de certification, à faire baisser les coûts et les délais tout en revalorisant le rôle des inspecteurs.
Conclusion / Transition
Si les mesures préconisées n’ont pas vu le jour ou n’ont pas été à la mesure des attentes, ces rapports et propositions sont néanmoins des jalons essentiels dans l’analyse des besoins de réforme et dans la recherche de solutions de modernisation du permis. Ils mettent en lumière les problématiques qui sont encore et toujours des freins à l’apprentissage de la conduite, donc à l’optimisation de la sécurité et du bien-être des citoyens.
La volonté du groupe de considérer le permis comme un tout et d’y inclure sa mission de réduction des délais de présentation au permis fait écho aux travaux présentés. C’est dans leur lignée que le groupe a souhaité s’inscrire, tout en faisant le pari d’une approche différente, plus générale, de la problématique. Partant des constats largement étudiés, le groupe pointe le manque de fluidité et de coordination dans les échanges entre acteurs, l’inadaptation de la temporalité de la formation et le manque de sacralisation de cet examen, qui participe à la dégradation générale du permis. En filigrane, l’absence de valorisation et de prise en compte des besoins de l’ensemble des professions qui y sont liés apparaît comme un frein à l’évolution du système.
Le groupe a souhaité aborder sa mission comme une phase nouvelle dans la recherche de modernisation du permis de conduire. Par une approche globale, il souhaite prendre en compte non seulement l’ensemble des acteurs et leurs interactions mais aussi chaque étape du processus de l’examen du permis ainsi que l’aspect organisationnel du système d’apprentissage de la conduite. La démarche du groupe a pour objectif de proposer des solutions concrètes à une problématique sociale de premier plan.
LES MESURES D’URGENCE PROPOSEES PAR LE GROUPE ET RETENUES PAR LE MINISTRE
Dans un premier temps, le groupe a proposé au ministre de l’intérieur, qui les a toutes retenues, des mesures d’urgences visant à mettre un coup d’arrêt à l’augmentation des délais de présentation au permis. L’objectif était de contenir le manque de places d’examen et d’assurer une prise en charge concrète et rapide de la problématique tout en ayant le temps par la suite d’approfondir les travaux et de proposer des mesures pérennes.
Ces mesures d’urgences proposées en novembre 2013 sont :
· maintenir les effectifs d’ IPCSR : le recrutement de 25 IPCSR a été décidé en 2014 ;
· concentrer l’activité des IPCSR autour du passage des épreuves pratiques du permis de conduire : élargir le vivier des agents publics habilités à faire passer l’épreuve théorique générale (ETG) aux inspecteurs et délégués retraités : l’arrêté du 12 février 2014 a autorisé les services à recruter ces agents par contrat ;
· extension et prorogation du dispositif des examens supplémentaires du permis de conduire pour les années 2013 et 2014 : ouverture de 10 000 places d'examen supplémentaires en 2013 et 2014 portant ainsi le nombre de places d’examens supplémentaires en 2014 à 60 000 : 30 000 seront consommées à mi-année ;
· soutenir une harmonisation territoriale : faciliter le renfort d’IPCSR extérieurs sur les territoires en difficultés et inciter l’installation d’IPCSR sur ces mêmes territoires ;
· favoriser les différents modes d’apprentissage de la conduite accompagnée (apprentissage anticipé de la conduite, conduite supervisée, conduite encadrée) ;
· améliorer l’information et la concertation au sein des instances nationale et départementales dédiées à l’attribution des places d’examen ;
· améliorer la qualité de l’enseignement : encourager la mise en place rapide du titre professionnel des enseignants de la conduite remplaçant le BEPECASER en trouvant un vecteur législatif permettant la mise en place de l’autorisation temporaire et restrictive d’enseigner (ATRE) ;
· relancer la démarche sur l’harmonisation des pratiques d’évaluation en examen B
du permis de conduire ;
· fluidifier l’instruction des demandes de permis nécessitant la production des attestations scolaires de sécurité routière de premier ou de second niveau (ASSR 1 ou ASSR 2) ou de l’attestation de sécurité routière (ASR) ;
· redéfinition pour une période limitée de la méthode nationale d’attribution des
places d’examens.